Blackwater, tome 1 : La Crue - Michael McDowell

 «À l’aube du dimanche de Pâques 1919, le ciel au-dessus de Perdido avait beau être dégagé et rose pâle, il ne se reflétait pas dans les eaux bourbeuses qui noyaient la ville depuis une semaine.»


Le résumé :

Bienvenue à Perdido ! Venez découvrir ce coin tranquille de l’Alabama aux rues cossues, gouverné par de riches familles, et qui doit tout à ses rivières. Des rivières généreuses, mais aussi dangereuses, qui donnent et qui prennent. Voyez-les bouillonner au pied des maisons, entendez leur écho dans le bourdonnement des scieries, sentez-les perturber le cours paresseux de la vie…

Ces flots boueux, capables de vous aspirer par le fond et de ne jamais rendre votre corps, cachent des mystères insondables. Qui sait ce qui se passe la nuit, quand les manigances s’apaisent, quand l’argent dort enfin, et que les ambitions se sont tues ?

Et qui est cette Elinor Dammert, jeune beauté aux cheveux ocre, merveilleusement apparue un jour de crue, et qui vient perturber l’équilibre en place ? Que dissimule-t-elle derrière son sourire affable ? Et quel lien étrange entretient-elle avec la Perdido ?

 

«- Je suis sûre que je m'amuserais plus en trente minutes à un coin de rue de La Nouvelle Orléans ou de Nashville qu'en une vie entière à Perdido. La chose la plus excitante à faire ici, c'est de s'asseoir au bord de la rivière et compter les cadavres d'opossum qui passent.»

 

Ma chronique : 

Difficile de passer à côté du succès de la saga Blackwater ces derniers mois ! Publié sous forme de six livres poches à chacun deux semaines d’écart, ce roman feuilleton nous plonge dans le sud-est des États-Unis au début du XXe siècle. Ce qui est certain c’est que l’objet-livre en lui-même attire l’œil avec une superbe couverture, très travaillée, qui sort de l’ordinaire.

En guise d’introduction, le tome 1, intitulé La Crue, nous présente les membres de la fameuse famille Caskey au cœur de cette « épique saga familiale » et la ville d'Alabama dans laquelle ils vivent, Perdido. Au fil des chapitres, on rencontre les différents personnages et éléments qui gravitent autour et constituent ce microcosme. Entre importance du paraître, commérages et course à la fortune, cette petite ville de riches familles propriétaires de scieries a bien des choses à nous raconter.

L’élément déclencheur est l’arrivée d’une mystérieuse jeune femme étrangère au sein de cette organisation bien huilée. Elinor Dammert est retrouvée indemne dans une chambre d’hôtel alors qu’une bonne partie de la ville s’est retrouvée sous l’eau depuis plusieurs jours à cause de la crue du fleuve qui la traverse. Ses sauveurs, le fils Caskey et son employé, la ramène auprès de leur communauté. Si la fascinante jeune femme est chaleureusement accueillie et acceptée par de nombreux habitants, d’autres en revanche voient son arrivée et son influence d’un très mauvais œil.

Si le début du roman est un peu longuet, entre scènes banales de la vie quotidienne et dialogues sans grand intérêt, je me suis malgré moi vite prise au jeu. Il ne se passe parfois pas grand-chose mais l’auteur ne laisse pas planer le doute bien longtemps : Elinor n’est pas une femme comme les autres, elle a une dimension surnaturelle. On en vient donc à tourner les pages avidement pour voir comment elle va se faire sa place à Perdido et quel chamboulement son arrivée va créer sur l’organisation de la ville, sur ses habitants, sur leurs petites habitudes et mœurs parfois discutables.

Le fantastique est tout d’abord présent par petites touches discrètes. Jusque dans le dernier quart du roman où des scènes mémorables entre horreur et surnaturel vont venir bouleverser pour les personnages la frontière fine entre cauchemar et réalité. J’ai adoré l’ambiance, parfois oppressante, qui est à mon sens vraiment bien travaillée, et qui n’est pas sans rappeler un certain Stephen King, et va crescendo. Le roman aborde également des thématiques telles que la condition féminine et la ségrégation raciale.

La Crue est un format poche d’environ deux-cent-cinquante pages donc il se dévore à toute vitesse. J’ai trouvé l’écriture fluide et agréable à lire avec un côté désuet qui m'a charmée. Il y a une certaine froideur de la plume vis-à-vis des personnages qui ne sont pas particulièrement attachants mais l’auteur apporte avec brio des touches d’humour et de grotesque avec lesquelles il se moque ou dénonce les comportements ou discours de certains de ses personnages.

Un premier tome relativement simple mais efficace, à la fois surprenant et mystérieux, qui a su me convaincre au bout de quelques chapitres. Les sagas familiales ce n’est pas forcément ce que je lis mais je dois dire que l’auteur a su piquer mon intérêt avec ce premier tome. Je lirai donc assurément la suite pour savoir ce qu’il va advenir des personnages et de la plus si tranquille ville de Perdido.

 

 «Ce n'est qu'un voile pour masquer la véritable impuissance des hommes dans l'existence. Ils contrôlent les lois, mais à bien y réfléchir, ils sont incapables de se contrôler eux-mêmes. Ils ont échoué à faire une analyse pertinente de leur propre esprit, et ce faisant, ils sont à la merci de leurs passions versatiles ; les hommes, bien plus que les femmes sont mus par de mesquines jalousies et le désir de mesquines revanches. Parce qu’ils se complaisent dans leur pouvoir immense mais superficiel, les hommes n’ont jamais tenté de connaître, contrairement aux femmes qui, du fait de l’adversité et de l’asservissement apparent, ont été forcée de comprendre le fonctionnement de leur cerveau et de leurs émotions.»

Titre : Blackwater, tome 1 : La Crue (titre VO : Blackwater, book 1 : The Flood)
Auteur : Michael McDowell
Éditeur : Monsieur Toussaint Louverture
Publication : avril 2022
Prix : 8,40€
Nombre de pages : 259

Commentaires